Le journal d'une mandragore

Je suis une mandragore et ceci est mon journal

Je ne suis pas de celles que tu remarquerais dans la foule. Je ne suis pas une de ces filles que tu trouverais mignonne. Une qui aime faire du shopping, se vernir les ongles, s’épiler les jambes (au secours !) ou glousser sur les fesses des garçons. De toutes façons j’aime pas les garçons, enfin j’ai rien contre eux, mais quand ils sont nus dans un lit avec moi j’ai l’impression d’être un magnétoscope : ils arrivent pas à trouver le bouton PLAY, mais il entrent et sortent la cassette en pensant que ça va marcher quand même. Et puis les filles sont quand même beaucoup plus jolies !

Je ne suis pas une de ces fortes à bras aux cheveux courts qui croient que pour être lesbienne il faut ressembler à un homme. Ni de celles qui pensent qu’il faut choisir son camp : active ou passive. Non mais franchement même chez les hétéros la fille est pas tout le temps sous son mec en attendant que les cinq minutes soient terminées (désolé les garçons, mais cinq minutes c’est mon estimation optimiste), elles prennent les devant aussi, et ça alterne et ça varie. Alors si même les hétéros font disparaître les rapports de domination, pourquoi nous, lesbiennes, ont devrait en créer de nouveaux, qui soient encore plus ridicules ?

Vous l’aurez compris je suis de celles qui se posent des questions, qui réfléchissent et qui n’acceptent pas les choses comme ça toutes cuites, sans les disséquer. Je suis une fille qui cherche, qui expérimente, qui s’amuse, qui rigole, pleure, s’agite, s’impatiente, s’énerve et boude. Une fille qui vit !

J’aime les papouilles, la tendresse, le partage, le sexe, les amies, les longues discussions sur le monde et tout ce qui ne sert à rien parce que de toutes façons on sortira jamais nos fesses de nos canapés douillets pour changer quoi que ce soit. J’aime m’engueuler au sujet de détails insignifiants de films et d’artistes, embraser une discussion en lancant un sujet enflammé sans le moindre intérêt, provoquer les gens. C’est rigolo. Mais si on n’était pas passionné-e-s par ces sujets, on dirais quoi ? Nos discussions seraient tristes et plates. Il faut de la vie, de la sueur, des cris, des larmes et de la cyprine !

Il me faut tout ça pour me sentir en vie, et me dire que ça vaut le coup de rester ici, parmi vous, et aimer vous regarder déambuler dans les rues. Moi je me sens étrangère à tout cela, un peu hautaine et on me le reproche souvent, mais c’est comme ça que je ressens mon rapport à ce monde. Que ça plaise ou non, je m’en fiche complètement.

Je suis une mandragore, je sors de terre, je suis magique et légendaire, mais ma vie est parfois plutôt pathétique et parfois fragile comme verre. Je vais tenter de vous raconter ça comme je le pourrais. Je suis une mandragore et ceci est mon journal ! (Hé hé ça fait classe comme ça hein ?)